Publié le 03/11/2025

Comment définissez-vous la « solitude des jeunes en insertion » et pourquoi avoir choisi ce sujet de thèse ?

La solitude était un sujet de plus en plus présent chez les jeunes. Ce qui est assez étonnant car dans les premiers temps, le terme de solitude était plutôt associé à la condition des personnes âgées, voire mourante, ainsi qu’aux femmes célibataires.  Aussi, la jeunesse est une période considérée comme particulièrement propice aux rencontres sociales. Pourtant, la solitude des jeunes est aujourd’hui au cœur des préoccupations médiatiques et politiques ainsi que des recherches scientifiques. Elle émerge alors comme un des élément central des problématiques de santé publique qui animent de nombreux débats.

La solitude est donc un fait social qu’il convient de traiter. Elle est souvent associée à l’isolement (physique, géographique…), mais réside aussi en un  « sentiment de solitude ». Qu’elle soit subie ou choisie elle fait partie intégrante de la construction des identités, et c’est ce qui m’intéresse.

D’autant plus parce que cette enquête sociologique est centrée sur les jeunes en insertion accompagné·es par les Missions Locales ; c’est-à-dire des jeunes dans une période de transition biographique et fortement invité·es à s’intégrer. Cette phase de transition peut être longue et parfois instable.

Puis, j’entretien aussi mon propre rapport à la solitude. J’ai à cœur de cette étude soit utile et cohérente avec les réalités des personnes concernées.

Quelles sont les différentes étapes de vos travaux ? Comment travaillez-vous avec le réseau ?

Je travaille depuis maintenant deux ans à l’Institut Bertrand Schwartz qui se donne pour missions de faire le pont entre la théorie et l’action ainsi que mettre en lumière la parole des jeunes et du réseau qui les accompagne. Il semblait donc tout naturel d’en faire mon terrain d’enquête.Jusqu’à présent, je me sens  soutenue par les professionnels du réseau, par les jeunes et les directions. Le sujet, bien que pas tout le temps joyeux, est très bien reçu.

C’est un travail qui va s’étaler sur 3 ans, avec différentes phases d’enquête et d’analyse. . D’abord la phase exploratoire : elle me permet de redéfinir mon sujet en cohérence avec les vécus par les jeunes accompagné·es en Mission Locale. Pour se faire, au cours d’entretien collective je rencontre des jeunes très divers (pas forcément ceux qui sontidentifié·es comme étant en situation d’isolement) ; je rencontre aussi des professionnel·les afin d’avoir leur point de vue et leur expertise de terrain.

La deuxième phase sera  une enquête quantitative. C’est la phase qui me permettra d’élargir encore davantage mon échantillon et d’aller vers toutes les Missions Locales avec un questionnaire construit grâce à la phase exploratoire. Il sera diffusé en 2026. Nous mobiliserons les professionnel·les pour faciliter la passation en Mission Locale à l’aide d’un kit adapté.

Enfin, la dernière phase se déroulera pendant la dernière année du projet. Nous rebasculerons sur des modalités d’enquêtes qualitatives. Ce seront des temps de rencontres et d’échanges où je vais recueillir des récits biographiques, des récits de vie. Cela se précisera tout au long de la recherche, évidemment.

Traiter du sujet de la solitude est important pour vous. Poursuivez-vous un objectif suite à ces travaux ?

Comme pour toutes les thèses, j’aimerais arriver à une publication d’ici quelques années. Mais pas uniquement. J’ai pour objectif de partager les résultats intermédiaires de cette recherche, et ceci de différentes manières pour que les professionnel·les mais aussi les jeunes puissent s’en emparer. Cela ouvrira peut-être encore plus d’espaces de discussion en Missions Locales et en hors. J’aimerais aussi que cela aboutisse à quelques actions au cœur de cette recherche, si le temps me le permet. Je garde un peu de suspens pour le moment !

Quoi qu’il en soit, les Missions Locales pourront s’approprier mon travail et je me dis que cela les aidera dans leur démarche d’amélioration continue. A une autre échelle, peut-être que cela aura une influence sur notre manière de concevoir et mettre en œuvre les politiques publiques de cohésion sociale.

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