Publié le 05/10/2025
L’illettrisme en Guyane et les limites de l’outil EVA sur le territoire
Afin de repérer les difficultés relevant de l’illettrisme ou de l’illectronisme, l’outil EVA est déployé dans les différentes Missions Locales. Cependant, les limites de cet outil se font particulièrement ressentir dans les territoires d’Outre-Mer, notamment en Guyane, où tous les jeunes n’ont pas été scolarisés en français. En effet, la barrière linguistique y entrave la collecte de résultats complets et fiables. Pour répondre à cette problématique, l’outil YANATEST a été mis en place spécifiquement pour les jeunes de Guyane. Conçu pour intégrer plusieurs langues, il permet de limiter les biais liés à la compréhension des textes. Par ailleurs, la maîtrise des outils numériques constitue une autre limite importante.
La mise en place de “Form’Active”
Pour faire suite à la réponse à un appel à projet de l’INJEP sur la thématique de l’illettrisme en 2022, la Mission Locale Centre Est Savane déploie, depuis 2023 et pour une durée de trois ans, l’expérimentation « Form’Activ ». Ce projet vise à répondre aux enjeux d’illettrisme et d’illectronisme sur le territoire.
Il s’appuie sur un constat alarmant : en 2019, seulement 2 % des jeunes en situation d’illettrisme s’inscrivaient aux formations de compétences de base, et ce pour plusieurs raisons, parmi lesquelles :
- la honte,
- les freins à la mobilité,
- les obstacles financiers,
- etc.
Loin d’être un parcours standardisé, « Form’Activ » propose une approche individualisée, articulée autour de trois piliers. Ceux-ci ont pour objectif de lever les freins identifiés et d’accompagner les jeunes en situation d’illettrisme ou d’illectronisme.
Le premier pilier s’attache à répondre aux problématiques évoquées précédemment grâce à des kits spécifiques : un kit mobilité, incluant la prise en charge des transports pour les jeunes se rendant en formation de compétences de base ; des bons de restauration ; un « kit accompagnement », qui consiste en un co-accompagnement assuré par les organismes de formation, les conseillers référents et l’équipe « Form’Activ ». Ce dispositif, proposé dans les centres de formation, aide les jeunes à établir un lien entre leurs apprentissages et leur projet professionnel, tout en donnant du sens à leur parcours.
Le deuxième pilier est porté par l’association KALEDA, engagée dans la lutte contre l’illettrisme en Guyane. Elle propose des modules courts, d’une durée de deux à quatre semaines, complémentaires aux formations existantes. Ces modules permettent aux jeunes de développer des compétences transversales, telles que l’esprit critique, le travail en équipe ou encore l’analyse, afin de renforcer leur autonomie.
Le troisième pilier, intitulé « Le Labo de communication », adopte une approche transversale et plus large. Ce laboratoire est un espace d’échange dédié à la question de l’illettrisme. Il interroge : « Comment en parler autrement, et surtout positivement ? » L’objectif est de dédramatiser la situation pour les jeunes et de déconstruire les tabous, à travers des échanges, des campagnes d’affichage ou des vidéos, portés par les jeunes eux-mêmes – qu’ils soient concernés par l’illettrisme ou non.
Quel bilan intermédiaire ?
Dans le bilan de France Travail, porteur du plan de lutte contre l’illettrisme en Guyane pour les années 2022-2023 et 2023-2024, un constat a été établi : 39 % des inscrits en formation pour les compétences de base étaient des jeunes en 2024, contre 14 % l’année précédente. « Form’Activ » a en partie contribué à cette augmentation du nombre de jeunes accompagnés.
Les progrès des jeunes accompagnés sont visibles au fil des rencontres : gain d’autonomie, confiance en soi, meilleure compréhension de leur environnement, etc. À ce jour, 509 jeunes ont bénéficié de ce projet. Des « sorties positives » ont pu être constatées, que ce soit en termes d’entrée en formation ou d’accès à l’emploi. Ces résultats, plutôt positifs et encourageants, s’accompagnent d’une satisfaction marquée de la part des jeunes bénéficiaires.