Publié le 04/10/2021

Avant d’aborder l’ouvrage, pouvez-vous vous présenter en détaillant votre parcours et vos objets de recherche sur les questions de jeunesse ?

Tom Chevalier : J’ai commencé à m’intéresser aux questions de politiques publiques jeunesse dans le cadre de ma thèse, en science-politique, qui a fait l’objet de la publication d’un ouvrage aux Presses Universitaires de France, en 2018, intitulé « La jeunesse dans tous ses Etats ». Au travers d’une analyse comparée des différentes politiques publiques mises en œuvre par les Etats membres de l’Union Européenne sur les enjeux de lutte contre la pauvreté et les inégalités vécues par les jeunes, j’ai souhaité les catégoriser afin de mieux en cerner les fondements et les caractéristiques.

En écho à ce travail, je me suis également intéressé au rapport des jeunes au politique. Entre défiance vis-à-vis des institutions et mutations des formes d’engagement, il me parait essentiel de ne pas observer les jeunes uniquement en tant qu’objet des politiques publiques mais également en tant que sujet, acteurs de la vie de la cité.

Vous avez coordonné, avec Patricia LONCLE, l’ouvrage collectif réunissant près d’une dizaine de chercheurs intitulé « Une jeunesse sacrifiée ? ». Pouvez-vous revenir sur la genèse de la démarche et expliciter la problématique sous-jacente au titre que vous avez choisi ?

Constatant qu’il n’existait pas d’ouvrage de vulgarisation de l’état des connaissances sur les enjeux de jeunesse dans leurs différentes dimensions, début 2020, nous avons souhaité avec Patricia LONCLE, Professeure en sociologie, titulaire de la chaire de recherche sur la jeunesse à l’École des hautes études en santé publique, et les autres coauteurs contribuer au travers d’un ouvrage collectif à nourrir les réflexions du plus grand nombre sur ces questions. Il s’agissait pour nous de s’interroger collectivement sur la notion de « jeunesse sacrifiée » qui revient régulièrement dans le débat public.

Nous tenions tout d’abord collectivement à souligner la particularité de la situation de la jeunesse en France qui subit à la fois des inégalités intergénérationnelles et intra-générationnelles. Autrement dit, les jeunes ne sont pas une catégorie uniforme, il y a une grande diversité dans le vécu des jeunes qui est trop souvent gommée par le discours sur les inégalités intergénérationnelles. Notre démonstration consiste à rappeler que ces inégalités ne sont ni « naturelles » ni « inéluctables » mais le fruit de choix sociétaux et d’orientations des politiques publiques.

Enfin, comme je le disais précédemment, nous nous sommes également attachés à ne pas nous enfermer dans une vision misérabiliste des jeunes les cantonnant à être perçus comme « des problèmes ». Nous souhaitions contribuer à ce qu’ils soient davantage perçus comme un acteur politique, au sens de la vie de la cité, et ressources pour la société.

Enfin, sans en dévoiler le contenu, pouvez-vous nous en dire davantage sur les différents thèmes abordés dans les contributions ?

L’ambition commune au travers des différentes contributions est de reposer et de préciser les termes du débat.

Le 1er chapitre du livre, confié à Camille PEUGNY, est consacré à un état des lieux des inégalités vécues par les jeunes en insistant bien sur celles inhérentes à leur appartenance à cette génération et celles qui s’expliquent davantage par les inégalités sociales qui la traverse.

Dans le chapitre suivant, Nicolas CHARLES aborde la question des impacts de la massification scolaire sur les parcours des jeunes et la réduction des inégalités de destin. Ensuite, Benjamin VIAL et Léa LIMA, que vous avez récemment accueillie lors de votre assemblée générale, se proposent, au travers de leur contribution commune, d’analyser et d’expliciter les différents facteurs qui expliquent aujourd’hui le phénomène du non-recours aux droits chez les jeunes.

Sarah PICKARD et Cécile VAN DE VELDE, se penchent sur les colères des jeunes et leurs stratégies de mobilisation sous trois formes : antisystème, ancrées dans leur vie quotidienne et celles qui conduisent à une forme de radicalisation militante.

Dans le dernier chapitre que j’ai cosigné avec Patricia LONCLE, nous avons fait le choix de changer de prisme et de nous intéresser à comment les jeunes, par leurs mobilisations, peuvent contribuer à changer l’action publique en nous appuyant sur l’exemple de la Coop’ ESKEMM à Rennes. Enfin, nous avons ajouté une postface sur la notion de Génération COVID à posteriori, bien que nous manquions de recul et de données, afin d’inscrire notre démarche dans l’actualité.

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